En direct du procès V13 : la fin des témoignages des parties civiles

Publié le 02 novembre 2021
Procès V13

© Radio France / Valentin Pasquier

 

C’est la fin d’une intense période de presque cinq semaines consacrée aux témoignages des victimes des attentats du 13 novembre, clôturée par les témoignages des associations : Life Fore Paris, 13onze15 Fraternité Vérité, Association Française des Victimes du Terrorisme et Fédération Nationale des Victimes d’Attentats et d’Accidents Collectifs.

Ces témoignages ont été difficiles pour tous : entre cris sourds de douleur, blessures visibles et invisibles, souvent béantes, torrent de tristesse, désespoir, colère, avalanche d’amour et lueurs d’espoir...

Il y a eu des moments d’audience extrêmement forts. Certains qui ne se connaissaient jusqu’alors pas se sont tombés dans les bras, unis dans une souffrance indicible. D’autres ont pu connaître les derniers instants de leur proche. D’autres ont parlé avec rage de leur besoin de vivre encore plus, pour tous ceux qui y étaient restés.

Certains se sont trouvés des “compagnons” d’audience, qui les accompagneront pendant les prochains mois du procès, prévu pour durer jusque courant mai 2022.

Pour certains, cette période de témoignages a été longue (plus de 300 témoignages).

Pour d'autres, elle était courte (environ 2.400 victimes constituées parties civiles).

 

Ces témoignages ont été importants pour tous : 

  • Pour les victimes qui se sont exprimées, cela peut constituer une forme de soulagement ;
  • Pour les victimes qui ont écouté tous ces témoignages et s’y sont retrouvées : c’était l’occasion de mettre des mots sur certains maux, de constater que le sentiment de culpabilité qui envahit la plupart des victimes alors qui n’a aucune raison d’être, est partagé par beaucoup, de partager leur vécu et reconstituer le puzzle de la soirée, de se sentir moins seul face à la froideur du Fonds de garantie…
  • Pour les victimes endeuillées en quête de reconstitution des faits et d’informations qui ont pu approcher la réalité des faits qui ont conduit à la disparition de leur proche ;
  • Pour les proches des victimes directes des faits, parfois confrontés au silence des leurs ou qui sont démunis face à certaines de leurs réactions ;
  • Pour la Cour, qui a pénétré dans l’enfer du Stade de France, des terrasses parisiennes, du Bataclan et surtout dans la “vie d’après” des victimes : prise de conscience de ce qu’est l’angoisse de mort imminente, des critiques massives contre le Fonds de garantie et ses experts, du fait que les constatations des enquêteurs qui figurent au dossier ne rendent que très partiellement compte des faits (les montagnes de corps enchevêtrés, vivants et morts, au Bataclan, l’atmosphère régnant dans les bars et restaurants, l’effet “confetti” des explosions des kamikazes…) ;
  • Pour les Avocats : tous ont pu mesurer le poids des faits jugés et l’importance de se montrer à la hauteur ;
  • Pour le public : c’est déjà une partie de l’Histoire de la France ;
  • Pour les accusés : plusieurs ont réagi, certains ont peut-être entendu le besoin de vérité des victimes ;

 

Ces témoignages, c’était mettre de l’humanité dans des faits inhumains.

C’était aussi associer un visage, une voix, une histoire aux victimes, les identifier alors qu’elles ont été choisies à l’aveugle, non pas pour elles personnellement, mais pour ce qu’elles représentent.

D’autres victimes des attentats du 13 novembre 2015 viendront à la barre courant mars/avril 2022, avant les plaidoiries des parties civiles, pour une deuxième phase (plus courte) de témoignages.

Entre temps, la Cour d’assises spécialement composée de magistrats professionnels examinera successivement, la personnalité des accusés, leur radicalisation, le contexte syrien et l’Etat Islamique, entendra de nouveaux enquêteurs qui développeront les charges pesant sur les accusés et interrogera longuement ces derniers sur les faits qui leur sont reprochés.

Laura Costes, Avocat
Alicia Renard, juriste
Pôle attentats, Cabinet ACG