Loi d'urgence du 23 mars 2020 et congés payés imposés : rappel des modalités de calcul et de décompte des jours de congé

Publié le 27 mars 2020

La loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 contient des dispositions relatives à l'adaptation à venir du Code du Travail ; l'article 11 1 b alinéa 4 autorise, en effet, le gouvernement à prendre, par ordonnance, des mesures visant à adapter le Code du Travail :

« (...) afin de permettre à un Accord d'Entreprise ou de branche d'autoriser l'employeur à imposer ou à modifier les dates de prise d'une partie des congés payés, dans la limite de 6 jours ouvrables, en dérogeant au délai de prévenance et aux modalités de prise de ces congés définies par les dispositions du Livrer 1er de la troisième partie du Code du Travail par les conventions et accords collectifs applicables dans l'entreprise ».

L’ordonnance n°2020-323 du 25 mars 2020 confirme l’ensemble de ces principes en ajoutant que la définition unilatérale des congés par l’employeur doit respecter un délai de prévenance qui ne peut être inférieur à un jour franc.

Les jours de congés qui sont impactés peuvent être ceux déjà acquis et ceux en cours d’acquisition jusqu’ à la fin de la période en cours.

Le Code du Travail renvoyait au champ de la négociation collective les modalités de définition et d’'organisation des congés payés. A défaut de dispositions conventionnelles, le Code du Travail prévoyait que l'employeur, après avis des Représentants du Personnel, définissait l'ordre et les dates des congés au moins deux mois à l'avance ; toute modification des dates arrêtées ne pouvant intervenir qu'un mois à l'avance.

De telles dispositions vont s'effacer temporairement, dans le cadre des dispositions liées à cette loi du 23 mars 2020 liée à l'urgence sanitaire et de l’ordonnance du 25 mars 2020.
L'employeur pourra imposer ou modifier les dates de prise de congés payés, dans la limite de 6 jours ouvrables.

Le législateur a pris le pari de renvoyer à la négociation collective (Accord d'Entreprise ou de branche) la faculté d'autoriser l'employeur à recourir à cette modalité de poause des congés payés.

Employeur et salariés vont donc s'attacher à regarder les compteurs de congés payés acquis et les marges de manœuvre ainsi disponibles.

Le rappel des modalités de calcul et de décompte des jours de congés apparaît, dès lors, utile pour ne pas s'éterniser dans de longues discussions.

Le Code du Travail définit la durée du congé à hauteur de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur ; sachant que la durée totale exigible ne peut excéder 30 jours ouvrables.

Tous les salariés, y compris ceux à temps partiel, acquièrent 2,5 jours ouvrables par mois de travail effectif ou, le cas échéant, si l'entreprise décompte, à titre dérogatoire, les jours de congés en jours ouvrés, 2,08 jours ouvrés par mois.

Le principe fixé par le Code du Travail est celui d'un décompte en jours ouvrables.

Sont assimilées à un mois de travail effectif, pour la détermination de la durée du congé, les périodes équivalentes à :
-  4 semaines,
- 24 jours pour les horaires de travail répartis sur 6 jours,
- 20 jours pour les horaires de travail répartis sur 5 jours de la semaine.

Le calcul le plus favorable pour le salarié doit être retenu par l'employeur et le résultat est toujours arrondi à l'entier supérieur.

Toute une série d'absences sont assimilées par la loi du travail effectif pour l'acquisition des droits aux congés payés. Il s'agit notamment :
- du temps de présence dans l'entreprise,
- des périodes de congés payés,
- des congés Maternité/Paternité ou d'adoption,
- des absences liées à la maladie professionnelle ou à un Accident du Travail, dans la limite d'une année,
- des périodes de repos compensateur,
- des congés Formation.

A contrario, ne sont pas considérés comme du travail effectif et n'ouvrent donc pas droit à congés payés :
- les arrêts-maladie,
- les grèves,
- les congés parentaux à temps plein,
- les périodes de mise à pied disciplinaire,
- les congés de présence parentale.

L'acquisition des jours de congés se fait sur une période appelée « période de référence », s'étalant, à défaut de dispositions contraires (Accord d'Entreprise, Convention Collective) du 1er juin jusqu'au 31 mai de l'année suivante.

• Exemple de calcul des congés acquis pour 175 jours travaillés pendant la "période de référence" :
- conversion des jours travaillés en semaines
(une semaine = 7 jours calendaires) :
175 : 7 = 25 semaines

- conversion des semaines en mois
(4 semaines = 1 mois de travail effectif) : 25 semaines / 4 = 6,25 mois

Le salarié acquiert 2,5 jours de congés payés
ouvrables pour chaque mois de travail effectif : 6,25 x 2,5 = 15,625 jours.

Le nombre de jours est arrondi à l'entier supérieur,
ssoit : 16 jours de congés payés acquis.

• Exemple de calcul de droits aux congés pour un salarié ayant travaillé 21 jours, avec répartition des horaires sur 5 jours :
- 21 jours = 3 semaines
Selon cette méthode, le salarié a acquis 1,875 jours de congés payés (3 x 2,5 : 4), avec un arrondi supérieur à 2.

Cependant, le salarié a atteint 20 jours de travail effectif ; il a donc droit à ses 2,5 jours.

C'est la méthode la plus favorable qui s'applique pour le salarié.

• Dernière question : Le samedi est-il décompté comme un jour de congés payés, que l'entreprise peut imposer ?
Le principe est que les congés payés se décomptent en jours ouvrables ; le samedi est considéré comme un jour ouvrable, même si le Personnel ne travaille pas ce jour-là.

Conséquence : le fait d'être en congés payés le samedi est compté pour un jour de congés payés.
Ce principe ne doit pas être confondu avec celui selon lequel les congés payés débutent le premier jour pendant lequel le salarié aurait normalement dû travailler.

Exemple : Le salarié arrête de travailler le vendredi soir ; son premier jour de congé est le premier jour ouvrable pendant lequel il aurait dû travailler : soit le lundi ; il est alors en congé durant toute la semaine jusqu'au samedi, qui est considéré comme un jour ouvrable : soit une semaine de 6 jours ouvrables de congés prise ; il reprend son travail le lundi.

Autre exemple : Le salarié arrête de travailler le jeudi soir ; son premier jour de congé est le premier jour ouvrable pendant lequel il aurait dû travailler : soit le vendredi ; puis, ensuite, le samedi et ce, jusqu'au samedi de la semaine en question inclus.

Le décompte des congés payés exige donc de la patience et ... une bonne calculatrice.

Gérald CHALON, avocat à Reims en droit du travail et droit public
Gérald CHALON
Avocat associé