L’audition de l’enfant en justice

Publié le 15 janvier 2014

A partir de quel âge un enfant peut-il être entendu ? Comment doit-il en faire la demande ? Est-ce obligatoire ?

La loi prévoit que dans toute procédure le concernant le mineur capable de discernement peut être entendu par le juge ou par la personne désignée par le juge à cet effet. Cette audition est de droit lorsque le mineur en fait la demande. Lorsque le mineur refuse d’être entendu, le juge apprécie le bien-fondé de ce refus

Le premier critère nécessaire à l’audition de l’enfant en justice est donc l’existence d’une procédure le concernant. Il n’est pas lui-même partie à la procédure, il n’en est pas à l’origine. En revanche, si ses parents saisissent le juge et ne parviennent pas à se mettre d’accord sur son lieu de résidence ou sur les modalités du droit de visite et d’hébergement, l’enfant peut ou doit (s’il le demande lui-même) être entendu.

La loi ne fixe pas d’âge minimum. Elle exige que l’enfant mineur soit capable de discernement, c’est-à-dire capable de raisonnement. Dans tous les cas, il s’agit d’un exercice particulièrement difficile : comment recueillir la parole d’un enfant, parfois très jeune sur la façon dont il souhaite vivre auprès de chacun de ses parents ?

L’audition d’enfants très jeunes par le juge ne permet généralement pas de distinguer ce qui lui serait favorable. Soit il a été influencé par les déclarations d’adultes qui vivent autour de lui et il répètera un discours entendu qu’il a fait sien sans possibilité d’analyse en raison de son jeune âge, soit il est muet parce qu’impressionné par les enjeux d’un conflit qui le dépasse, le lieu de l’audition, l’inquiétude exprimée par tel ou tel parent, la crainte de décevoir.

Pour cette raison le législateur a prévu que le juge peut déléguer à une autre personne le soin d’entendre l’enfant. Le recueil de sa parole se fait alors dans le  cadre d’une enquête sociale, qui permet d’entendre, dans leur lieu de vie, tous les membres de la famille et de recueillir des témoignages extérieurs (enseignants, grands parents, compagnons de vie…). L’enfant peut également être entendu par un psychologue  qui reçoit individuellement chaque membre de la famille et analyse les personnalités, les déclarations, les interactions existant entre eux, pour en déduire le mode de fonctionnement familial et donner un avis sur les modalités de prise en charge des enfants les plus adéquates dans le cadre d’une séparation des parents.

L’avis exprimé par un enfant mineur n’oblige pas le juge, qui doit se livrer à une appréciation du bien fondé des préférences éventuellement exprimées. La parole d’un enfant très jeune est analysée avec précaution. En revanche un adolescent, capable de motiver les raisons qui lui font demander de vivre au domicile de tel parent, ou d’organiser les droits de visite et d’hébergement d’une façon particulière, aura toute chance d’obtenir ce qu’il demande, si le juge a acquis la conviction que sa parole est libre.

Le mineur qui demande à être entendu est accompagné d’un avocat désigné par le Bâtonnier de l’ordre, ou par une personne de son choix sous réserve de ce que le juge estime que la présence de la personne choisie est opportune.

L’avocat désigné doit rencontrer l’enfant avant l’audience. Il appartient donc aux parents de s’organiser pour permettre cette rencontre. Elle est indispensable pour que l’enfant soit informé de ses droits, de l’importance de ses déclarations mais aussi de leur relativité puisque le juge n’est pas tenu d’appliquer ce qui sera sollicité et du fait que ses parents auront connaissance de ses propos (un compte rendu de l’audition, établi par le greffier, sera transmis aux parents pour leur permettre de réagir).

Il ne faut pas perdre de vue qu’un enfant qui demande à être entendu est le plus souvent en grande souffrance. La rencontre avec le juge est un moment angoissant, mais sur lequel le mineur fonde beaucoup d’espoirs. La demande d’audition doit donc être réfléchie pour pouvoir être assumée par l’enfant.
Le 11 janvier 2014, article rédigé par Maître Isabelle DOMONT-JOURDAIN du cabinet ACG

Isabelle DOMONT-JOURDAIN, avocate à Troyes pour la famille
Isabelle DOMONT-JOURDAIN
Avocat associé

Dans la même thématique

Que faire si le parent ne respecte pas un jugement du juge aux affaires familiales sur l’autorité parentale ou la pension alimentaire ?

Que faire si le parent ne respecte pas un jugement du juge aux affaires familiales sur l’autorité parentale ou pension alimentaire ?

Indemnité d'occupation et jouissance d'un bien indivis

Publié le 18 décembre 2023 - Thème(s) : Thème : Droit de la famille, Thème : Divorce, séparation, Thème : Liquidation et partage de régime matrimonial, communauté, indivision
Il est classique que lors d’une séparation l’un des conjoints parte et l’autre reste dans la maison indivise dont ils sont tous deux propriétaires.

ABC des régimes matrimoniaux

Publié le 30 novembre 2023 - Thème(s) : Thème : Droit de la famille, Thème : Liquidation et partage de régime matrimonial, communauté, indivision
Un panorama synthétique des contrats matrimoniaux existants pour comprendre simplement la portée et le cadre de chaque type de contrat. 

La séparation du couple et l’indivision immobilière

Publié le 14 décembre 2022 - Thème(s) : Thème : Droit de la famille, Thème : Divorce, séparation
La séparation du couple et l’indivision immobilière, ce qu'il faut savoir. Explications de Me Haumesser Traverse, avocate de la famille

Créances dans le couple : combien de temps a le conjoint pour les réclamer à l’autre ?

Publié le 12 décembre 2022 - Thème(s) : Thème : Droit de la famille, Thème : Divorce, séparation
Créances dans le couple : combien de temps a le conjoint pour les réclamer à l’autre ? Tout d’abord il convient de rappeler ce qu’est une créance entre époux ou partenaires ou concubins. Explications de Me Aude GALLAND, avocate de la famille.

Inertie d’un héritier : comment le contraindre à opter dans la succession ?

Publié le 25 novembre 2022 - Thème(s) : Thème : Droit de la famille, Thème : Succession, donation, testament, assurance-vie
Une succession peut être très rapidement bloquée par l’absence de prise de position d’un héritier. Cet héritier n’indique pas s’il entend accepter ou renoncer à la succession, et ne répond à aucunes sollicitations ni de ses cohéritiers ni du notaire chargé du règlement de la succession. Cette inertie est problématique pour ses cohéritiers qui, confrontés aux règles de l’indivision successorale, se retrouvent bloqués dans leurs démarches. Comment contraindre un héritier à opter dans la succession ?

Indexation de la pension alimentaire

Publié le 27 octobre 2022 - Thème(s) : Thème : Droit de la famille, Thème : Divorce, séparation

Bien souvent il échappe aux parents séparés, créanciers ou débiteurs d’une pension alimentaire, la disposition contenue dans leur décision de justice, leur convention de divorce ou accord parental relative à l’indexation de la pension alimentaire.

Cette indexation permet la revalorisation chaque année d’une pension alimentaire en fonction de l’évolution des flux.

Cette actualisation suppose l’application à la contribution parentale d’un indice de référence lequel tient compte de l’évolution des prix à la consommation et donc de l’inflation.

La coparentalité et les modes amiables d’organisation de la vie des enfants en cas de séparation de leurs parents

La séparation d’un couple marié ou pas est toujours un évènement douloureux tant pour les parents que pour leurs enfants. Aussi est-il primordial de préserver ces derniers et d’agir dans le respect absolu de l’intérêt de l’enfant.

Vacances d’été : l’exercice du droit de visite et d’hébergement, l’organisation des vacances, le paiement des pensions alimentaires.

C’est bientôt les vacances et vos questions se bousculent autour de l’exercice du droit de visite et d’hébergement, l’organisation des vacances, le paiement des pensions alimentaires.

Quelques réponses aux questions récurrentes ci-dessous :

• OUI, vous devez continuer à régler la pension alimentaire fixée même si vous avez les enfants pendant un mois de vacances. La contribution est lissée sur l’année.

Changer de nom de famille sur simple déclaration en Mairie - Loi du 2 Mars 2022

Publié le 14 avril 2022 - Thème(s) : Thème : Droit de la famille, Thème : Changement de prénom ou nom

A compter du 1er juillet 2022, toute personne majeure pourra choisir de porter le nom de sa mère ou de son père ou les deux ou d’en inverser l’ordre.
Ce changement ne pourra intervenir qu’une fois dans sa vie.